Plan financier de législature
Conformément à l’article 14, alinéa 3 de la loi sur les finances de l’État et des communes (LFinEC), le plan financier résume les tendances attendues du fait du contexte économique, social, politique et sanitaire, ainsi que les conséquences des orientations envisagées pour éviter une détérioration de la situation financière de l’État.
Les premières projections réalisées ont en effet démontré l’importance du défi à relever pour conserver ou retrouver la maîtrise des finances après deux ans de pandémie, dix ans de réformes fiscales continues et en présence d’enjeux de taille, tant économiques, environnementaux que sociaux.
Après une première révision des hypothèses retenues, les améliorations résumées dans le présent plan financier permettent de ramener les déficits entre 64 et 45 millions de francs entre 2023 et 2025, avec une amélioration régulière chaque année. Le Conseil d’État vise l’équilibre budgétaire en 2024, dès lors que cet exercice peut intégrer les effets des mesures structurelles envisagées, sans reporter aux calendes grecques les perspectives d’amélioration. Il affiche néanmoins encore un déficit de 52 millions de francs, illustrant la mobilisation encore nécessaire de toutes les autorités pour restaurer les équilibres attendus.
Les orientations envisagées par le Conseil d’État s’inscrivent dans la dynamique économique qui prévaut actuellement : un taux de chômage inférieur à 4%, un tissu industriel – en particulier horloger – prospère, bref des signaux qui laissent augurer une reprise sans crise sociale majeure. Le résultat des comptes 2021, inconnu lors de l’élaboration du présent plan financier, donne aussi des signaux d’optimisme et rend crédible l’objectif d’un retour à l’équilibre en 2024 si le travail entamé avec l’élaboration de ce plan est soutenu et poursuivi au cours des prochains mois.
Le plan financier n’intègre aucune croissance des prix (qui affecte charges et recettes). Les mécanismes de progression salariale ont été considérés comme compensés dans la durée par le renouvellement des titulaires de fonction publique. Enfin, d’éventuels effets résiduels de la pandémie seront au besoin neutralisés, dans les prochains exercices comme depuis deux ans, par des prélèvements aux réserves. Le plan offre donc une vision assez proche de la situation structurelle de l’État et de son évolution.
Concernant les multiples initiatives pendantes (fiscalité, transports, culture, sports, soins dentaires, péréquation), seuls les engagements pris à ce jour par le gouvernement (rétrocession aux communes d’une part supplémentaire du produit de la taxe sur les véhicules, respectivement coûts du contre-projet à l’initiative sur la gratuité des transports) ont été considérés. D’autres éléments, combattus, incertains ou en grande partie compensés, n’ont pas été intégrés. Le Conseil d’État relève toutefois que nombre de ces initiatives sollicitent des charges nouvelles, par dizaines de millions de francs. Une majorité d’entre elles pose aussi la question de la répartition des responsabilités et des flux financiers entre État et communes. Au-delà des questions sectorielles posées, leur traitement imposera donc des réponses institutionnelles et qui tiennent compte des équilibres financiers globaux des collectivités.
Le volume des investissements, traduit l’ambition du Conseil d’État pour moderniser, assainir et rationnaliser les infrastructures et le fonctionnement de l’État. En l’occurrence, une ambition en grande partie partagée par le Grand Conseil dès lors qu’une part importante de ces enveloppes correspond à des engagements déjà pris et à des projets et crédits en cours. Les derniers arbitrages, réalisés au moment de l’élaboration des budgets, permettront de fixer à 100 millions de francs nets les enveloppes annuelles, hors prêts accordés, de façon à conserver la maîtrise sur les charges financières, d’amortissement et d’entretien. La part importante consacrée à des investissements d’assainissement et de rationalisation contribuera aussi à cet objectif.
De façon générale, le Conseil d’État considère que les finances publiques demanderont avant tout recul et sensibilité. Premièrement, les importants défis à relever solliciteront des moyens conséquents. En second lieu, la santé des finances publiques est essentielle pour l’image du canton et son attractivité, la crédibilité de l’État et la sérénité du débat politique. En troisième lieu, des plans d’austérité trop sévères mineraient aussi sûrement qu’un déséquilibre durable des finances la capacité d’agir et de réformer, ainsi que la cohésion cantonale.
En conséquence, la gestion des finances publiques sera avant tout caractérisée par la recherche des équilibres qui permettent de préserver la dynamique positive dans laquelle, malgré la pandémie, notre canton s’inscrit à nouveau. Et l’ambition est que cette dynamique nourrisse à son tour celle de la démographie, de l’économie, de la solidarité et de l’autonomie de chacune et chacun.
Ci-dessous figure la synthèse des projections financières entre 2022 et 2025 pour les comptes de résultats et des investissements. Les détails sont présentés par domaine fonctionnel dans la suite du chapitre.
Administration générale
Contexte initial : Entre 2022 et 2023, une croissance de la facture énergétique, ainsi qu’une hausse des coûts pour le renouvellement, la maintenance et la sécurisation des infrastructures informatiques sont planifiées. La progression de l’excédent de charges du domaine entre 2022 et 2025 s’explique également par l’évolution attendue des amortissements.
Orientations : Le Conseil d’État veut ramener l’excédent de charges du domaine au niveau constaté aux comptes 2020 grâce à plusieurs programmes d’optimisation. Il s’agit en premier lieu de fixer les investissements à 100 millions de francs nets par an, hors prêts accordés, permettant de contenir l’évolution de la charge d’amortissements. L’optimisation des partenariats et des subventions, ainsi que des achats, les profits tirés de la simplification, de la standardisation et de la digitalisation permettront aussi d’alléger les charges, de même que l’exploitation des synergies possibles entre services. En matière RH, la gestion des absences, la limitation de la progression des enveloppes de primes et l’examen de diverses externalisations apporteront aussi des améliorations. Enfin, la valorisation du patrimoine et des prestations facturées contribuera à l’amélioration, de même que l’intensification des efforts de recouvrement.
Ordre et sécurité publique, défense
Contexte initial : Ce secteur affiche une certaine stabilité. La légère progression de l’excédent de charges du domaine, qui intègre des prévisions de recettes raisonnablement optimistes, est de l’ordre de 500'000 francs par an. Elle s’explique notamment par la mise en œuvre longtemps ralentie du plan d’actions dans le domaine pénitentiaire et par la dernière adaptation des prix de pensions décidée au niveau concordataire.
Orientations : Les charges du domaine étant principalement salariales, ce sont les améliorations recensées au titre de la politique RH et des achats qui permettront de contenir l’évolution du domaine. Aucune réforme structurelle n’est envisagée dans ce secteur, dont les plans de développement, notamment pour l’activité pénitentiaire, ont déjà été ralentis au cours des dix ans écoulés.
Formation
Contexte initial : L’excédent de charges s’accroît initialement de 26 millions de francs entre 2022 et 2025, en raison principalement de la première échéance du contrat-formation, de l’augmentation croissante des charges liées à l’école obligatoire (subventionnement, pédagogie spécialisée), du renforcement de la formation continue des adultes et des formations dans les hautes écoles et de l’introduction de l’éducation numérique.
Orientations : L’augmentation continue des charges doit être contenue en privilégiant une stabilisation ou une progression ralentie des différentes enveloppes. Il en va ainsi notamment dans le domaine de la formation supérieure. La revalorisation des prestations au niveau du postobligatoire peut aussi être une orientation. Dans le domaine de l'évaluation des fonctions, les projets et contre-projets successifs n'ayant pas trouvé d'issue, l'alternative d'un déblocage progressif des derniers échelons des classes salariales les plus basses est envisagée. Enfin, des discussions doivent être menées avec les différents milieux concernés quant à la première échéance du contrat-formation. Au final, la croissance de l’excédent de charges pourrait être limitée de façon optimiste à 9 millions de francs entre 2022 et 2025.
Culture, sport et loisirs, Église
Contexte initial : Les charges sont globalement maîtrisées. L’évolution d’un peu plus de 1 million de francs entre 2022 et 2025 résulte principalement du renforcement des politiques publiques de ce domaine fonctionnel.
Orientations : La progression initialement envisagée en fonction des nouveaux instruments prévus dans le cadre de la révision de la loi sur la culture et de ceux fixés désormais dans la loi sur la sauvegarde du patrimoine est légèrement contenue. Le traitement des initiatives « Pour 1% culturel » et « 1% pour le sport » dira si l’engagement de l’État dans ces domaines doit ou non encore s’accroître à l’avenir.
Santé
Contexte initial : L’excédent de charges initial s’accroît de 25 millions de francs entre 2022 et 2025, principalement en raison de l’évolution des charges hospitalières, vraisemblablement sous-estimées dans le budget 2022, et du vieillissement de la population. Les premières sont presque hors de contrôle des autorités politiques dès lors que la LAMal impose la rémunération de toutes les prestations réalisées en limitant drastiquement les possibilités d’en contenir les volumes. Les prestations d’intérêt général (PIG) sont désormais stabilisées. Le virage ambulatoire se poursuit, y compris dans le domaine des addictions.
Orientations : Malgré les limites de l’intervention de l’État imposées par la LAMal, les synergies entre prestataires seront encouragées et les faibles marges de manœuvres laissées pour la gestion des quantités exploitées. Il s’agira par exemple d’introduire des tarifs dégressifs ou de limiter encore les PIG en fonction de la croissance des prestations facturées. Une amélioration de l’ordre de 4 millions de francs peut de façon optimiste être attendue de ces mesures entre 2023 et 2025.
Prévoyance sociale
Contexte initial : L’excédent de charges du domaine augmente de 15,7 millions de francs entre 2022 et 2025. Cette progression est principalement imputable à l’évolution attendue des primes d’assurance-maladie, du contentieux LAMal et des conséquences sociales de la pandémie. Le vieillissement de la population impacte également la prise en charge dans les institutions relevant de l’accueil et de l’hébergement des adultes et les prestations complémentaires.
Orientations : Au vu de l’évolution économique meilleure que prévu et du renforcement des efforts en matière d’intégration professionnelle, les projections en matière de charges d’aide sociale sont révisées et tablent sur la poursuite de l’évolution favorable de ces dernières années incluant une baisse du nombre de bénéficiaires. La croissance des primes d’assurance-maladie est établie sur un scénario d’évolution de 2 % par an. Une stratégie et des mesures sont envisagées afin de réduire l’ampleur du contentieux LAMal. Quelques ajustements techniques dans la facture sociale sont aussi prévus. Le recours accru aux prestations pour personnes impotentes de l’AVS et de l’AI devrait également soulager le budget de ce domaine. Des mesures d’impulsion seront envisagées pour favoriser l’inclusion professionnelle des personnes vivant avec un handicap. Au final, la charge nette cantonale pourrait être améliorée de 2 à 12 millions de francs entre 2023 et 2025 et la progression limitée à 3,6 millions de francs.
Trafic et télécommunications
Contexte initial : L’évolution de l’excédent de charge, de l’ordre de 7,5 millions de francs entre 2022 et 2025, s’explique principalement par la hausse des amortissements (y compris les subventions à l’investissement) et une augmentation des indemnités transport vu notamment les coûts du contre-projet à l’initiative « Pour des transports publics gratuits ». Les indemnités transport sont planifiées avec un retour à une fréquentation normale en 2024-25 ainsi qu’avec la participation complète de la Confédération en matière de trafic régional.
Orientations : La fixation des investissements à 100 millions de francs nets par an entraîne une réduction des amortissements, en complément à celle prise en compte dans le domaine de l’administration. En outre, le contre-projet à l’initiative « Pour des transports publics gratuits » sera, le cas échéant, mis en œuvre de façon échelonnée entre 2024 et 2026, ce qui se traduit par une amélioration de la charge initialement prévue en 2023 et 2024. L’amélioration de la charge nette du domaine est d’environ 1,5 million pour l’ensemble des exercices du plan financier.
Protection de l’environnement et aménagement du territoire
Contexte initial : L’excédent de charges augmente sur la période du plan financier, de l’ordre de 2,5 millions de francs. Il est directement lié pour ce domaine de classification avec la mise en œuvre du Plan climat.
Orientations : Le financement des mesures en faveur du développement durable, en particulier celles relatives à la mise en œuvre du Plan climat, sera assuré par la réserve prévue par la LFinEC, dont l’affectation ne sera plus limitée aux investissements. L’amélioration estimée se monte à 8 millions de francs par an dès 2024.
Économie publique
Contexte initial : L’excédent de charges de ce domaine est modéré et s’inscrit en diminution sur la période couverte par le plan financier. La relative modestie des montants consacrés aux politiques publiques dans ce secteur incitera à beaucoup de pertinence et d’agilité dans l’octroi des soutiens. Ceux-ci sont par ailleurs souvent prévus au travers de lois et de financements fédéraux (obligatoires ou miroirs).
Orientations : La modestie des dépenses de ce domaine et sa réduction entre 2023 et 2025 n’appelle pas d’interventions additionnelles pour en contenir l’évolution durant la législature.
Finances et impôts
Contexte initial : La conjugaison des effets à moyen terme de la pandémie et des réformes fiscales conduisent à des prévisions de recettes qui restent inférieures sur toute la période du plan financier au niveau atteint en 2020. Les recettes de la RPT sont estimées de façon optimiste, notamment au niveau de la compensation des recettes. Les recettes de la BNS sont prises en considération à leur niveau ordinaire, les excédents éventuels étant neutralisés par des versements aux réserves, conformément à la loi. Les conséquences de l’évolution de la fiscalité au plan international, très incertaines, ne sont pas prises en considération. Les recettes de la taxe sur les véhicules sont considérées comme stables, leur croissance attendue étant neutralisée par le versement supplémentaire envisagé en faveur des communes.
Orientations : La bonne tenue de l’économie neuchâteloise, malgré la pandémie et le retour à la croissance – même modeste – du nombre d’habitant-e-s, permet une amélioration, certes optimiste, des prévisions de recettes des impôts des personnes morales et des personnes physiques. Une amélioration de la gestion de la trésorerie entre les entités de l’État d’une part, entre l’État et ses partenaires d’autre part, permet aussi d’envisager une réduction des charges financières. Au final, une amélioration comprise entre 7,5 et 14 millions est attendue sur les années du plan financier.